La monarchie française - catholique - a soutenu plusieurs congrégations pour évangéliser les nouvelles colonies dès la fin du XVIème siècle.
Les Franciscains ou Frères Mineurs, Ordre créé en 1210 par St François d'Assise, vont débuter leurs missions à Hispaniola dés 1493.
Les Capucins sont une branche réformée des Franciscains, érigés en nouvel Ordre depuis 1525 et arrivés en France en 1575, on les retrouve au Brésil en 1612, puis en Guadeloupe dés 1645 (Pacifique de Provins)
Les Dominicains ou Frères Prêcheurs, encore appelés Jacobins, ont été créés par St Dominique en 1215, vont accompagner la colonisation espagnole à partir de 1511.Les Dominicains français dit Réformés sont réunis depuis 1608 en une congrégation à part, on va les retrouver en Guadeloupe et en Dominique.
Les Jésuites ou Compagnie de Jésus fondée par Ignace de Loyola en 1539, vont commencer leurs missions au Brésil en 1549, au Canada en 1611, on les retrouve en Martinique dés 1640, puis plus tard en Guadeloupe.
La congrégation Carme voit le jour sur le Mont Carmel, en Terre Sainte, où existait depuis le IVème siècle un pèlerinage à la Grotte du prophète Élie. En ce lieu mythique, au temps des croisades, les pères fondateurs, des ermites, s'étaient regroupés autour d’un chevalier nommé Berthold. Le mouvement neuf du Carmel de Touraine, connu sous le nom d’Observance de Rennes, ne s’est pas séparé de l’ancien Carmel mais tend à la réformer depuis 1612 : c'est de ce Carmel de Touraine que vont venir les Carmes de Marie-Galante...
Les débuts de la colonisation religieuse des Antilles :
1493 :Le rôle missionnaire de la colonisation se met en place : 12 missionnaires accompagnent Christophe Colomb dans son 2ème voyage, dont 3 missionnaires Franciscains les Pères Juan de la Deule, Juan de Tisin, le Frère Ramón Pané et un Bénédictin Bernardo Boyl. Le pape Alexandre VI par sa bulle Inter cetera charge les Rois Catholiques, Isabelle de Castille et Ferdinand d'Aragon, de convertir les populations du Nouveau Monde à la foi catholique et apostolique :
"...comme il convient à des Rois et Princes Catholiques, en vue de l'exaltation et du développement de la foi Catholique, vous vous êtes proposé, avec le secours de la clémence divine, de soumettre et de convertir à la foi Catholique ces continents et ces îles précités, leurs habitants et indigènes. Nous louons très vivement, dans le Seigneur, votre saint et louable projet ; nous désirons qu'il soit conduit à bonne fin, et que le culte même de Notre Sauveur soit établi dans ces pays."
1494 : Le roi du Portugal a jugé la précédente bulle papale trop favorable à la couronne Espagnole : après réouverture des négociations, le 7 juin est signé entre les 2 puissances coloniales, le royaume d’Espagne et le royaume du Portugal, le traité de Tordesillas : il partage le Nouveau Monde le long d'une ligne Nord-Sud à 370 lieues (1.770 km) à l'Ouest des îles du Cap-Vert.
1523 : Sous François 1er, une expédition de missionnaires dominicains français tente de s’établir en Guadeloupe pour évangéliser les Caraïbes : ils sont tous rapidement exterminés et finissent mangés en boucan
1536 :Jean Calvin, prêtre Français, réfugié à Bâle, publie " Institutio Christianae Religionis", où il présente sa théologie de la Réforme : le protestantisme va se développer...…
1562 :Première Guerre de Religion entre catholiques et protestants français.
1572 : 24 août, massacres de la St Barthélémy, point culminant des Guerres de Religion pour les Protestants avec environ 8.000 morts.
1598 :Le 13 avril, Edit de Nantes par Henri IV qui met fin aux Guerres de Religion : Il accorde aux protestants la liberté de conscience, la liberté de culte et des "places de sûreté", dont La Rochelle.Les 8 Guerres de Religion successives auront fait environ 100.000 morts chez les catholiques et les protestants…
1603 : 6 missionnaires Dominicains espagnols font escale à la Guadeloupe : "Les Caraïbes les transpercèrent de leurs flèches, et il n’est pas douteux qu’ils les firent boucaner en vue d’un repas de cannibales"
1615 : Edit Royal interdisant aux non-catholiques l'entrée et le séjour dans les Colonies.
1624 :Armand Jean du Plessis, cardinal de Richelieu, entre au Conseil du Roi : Il propose au Roi de lutter contre les Huguenots et de prendre le contrôle de la noblesse, trop indépendante. Il crée officiellement la Marine Royale, supprime la fonction d'Amiral de France pour centraliser les grandes décisions maritimes et mettre la Marine à l'abri des grands seigneurs. Il crée à son profit la charge de Grand-maître et Surintendant général de la Navigation et Commerce de France, il obtient le gouvernement de la plupart des ports du royaume…
1625 :Un convoi de galions espagnols, en partance pour le Mexique, s’arrête en Guadeloupe pour faire de l’eau (aiguade) : ils sont attaqués par les Caraïbes, qui font 17 morts dont 2 Jésuites et de nombreux blessés.
1626 :: Richelieu suit la demande de d’Esnanbuc et de Roissey et crée le 31 octobre avec 12 autres associés la Compagnie de St Christophe pour exploiter cette première implantation française aux Ante-Isles ainsi que les îles voisines : " Nous, soussignés, reconnaissons et confessons avoir fait et faire par ces présentes fidelle association entre nous pour envoyer sous la conduite des sieurs d’Enambuc et du Rossey, capitaines de marine, ou tels autres que bon nous semblera de choisir et nommer, pour faire habiter et peupler les Isles de Saint-Christophe et la Barbade et autres situées à l’entrée du Pérou, depuis le onzième jusqu’au dixhuitième degré de la ligne équinoctiale, qui ne sont point possédées par des Princes chrétiens, et ce tant afin de faire instruire les habitans desdites Isles en la religion catholique, apostolique et romaine, que pour y trafiquer et négociers des deniers et marchandises qui se pourront recueillir et tirer desdites Isles..." La "catholisation" est en route avec l'arrivée des premiers colons officiels l'année suivante...
1627 : 14 missions Jésuites protègent de l’esclavage 30.000 indiens Guarani au Paraguay, à la frontière des colonies espagnoles et portugaises : les Jésuites commencent à déranger les 2 premières puissances coloniales… 1634 :Procés de Galileo Galilei à Rome : " nous déclarons que toi, Galilée, t'es rendu fort suspect d'hérésie, pour avoir tenu cette fausse doctrine du mouvement de la Terre et repos du Soleil. Conséquemment, avec un cœur sincère, il faut que tu abjures et maudisses devant nous ces erreurs et ces hérésies contraires à l’Église" ... 1635 :Par contrat du14 février 1635,la Compagnie des Iles d’Amérique
Charles Liénard de L'Olive associé à Jean du Plessis d’Ossonville recoivent de la Compagnie des Isles d’Amérique la Commission pour coloniser la Guadeloupe. Selon le R.P. Breton : " Ces Messieurs donc après s'être chargés de la direction et maniement de l'île de Sainct-Christophle, résolurent de faire une autre colonie en celle de la Guadeloupe et en donnèrent la commission à M. de LOlive, lieutenant de M. d’Esnambuc à Sainct-Christophle, gentilhomme courageux et à M. du Plessis, advocat d'un bon esprit et d'une humeur grandement douce, qu'ils chargèrent d'emmener avecdesprebstres,delesentreteniravecleurs chappelles chacun en son cartier. Ayant laissé la liberté aux Seigneurs de la compagnie de leur en donner, M. le cardinal de Richelieu en demanda au R.P. Carré, prieur du noviciat général de Paris, lequel l'ayant proposé le soir mesme à ses religieux, les trouva tous disposés de porter la croix de Nostre Seigneur, de paroles et d'effect en des pais si éloignés. Après donc bien de la délibération, le R.P. Carré ën destina quatre : le R.P. Pélican, docteur en Théologie, religieux du couvent de Chartres, le R.P. Nicolas Breschet de Sainct-Dominique, du couvent de Troyes,le R.P. Raymond Breton, du couvent de Beaulne et le RJP. Pierre Griffon de La Croix, du couvent de Rheims, qui tous avec plusieurs autres sestoient retirés au noviciat pour y embrasser l'observance régulière. Le R.P. Pélican étoit le Supérieur et après luy en cas de mort ou d'absence, le P. Nicolas.Les Seigneurs de la Compagnie leur don- nèrent quelque pièce d'argent pour se pourvoir d'orne ments, livres et autres choses nécessaires pour le service divin.Mais tout premièrement on eust soin de faire approuver nostre dessein au Saint-Siège et obtenir des facultés et privilèges, ce qu'on obtint facilement et on les reçeust avec joye de se voir appuyés du Sainct-Siège en cette entreprise "
Un bref apostolique accorde ces pouvoirs aux 4 Dominicains le 12 juillet :
Ils partent de Dieppe le 25 mai sur 2 navires avec des 400 engagés, essentiellement Normands et Bretons avec un contrat de 3 ans qui servait à payer leur passage, et les 4 missionnaires de l’Ordre de St Dominique. Le 25 juin, ils font escale à la Martinique, plantent le drapeau du Roi avec un Te Deum et repartent le lendemain. Le 27 juin, ils arrivent en vue de la Guadeloupe. Le 28 juin, ces premiers colons et les 4 Dominicains débarquent à l’ouest de la Pointe Allègre à Nogent, l’actuelle Ste Rose, dans ce qui sera baptisée plus tard Anse Vieux Fort. Selon le R.P. Pelican : " Nous ne mismes pas néantmoins pied à terre le jour mesme ains seulement le lendemain qui estoit jeudy veille des Apôtres Sainct Pierre et Sainct Paul où nous commençasmes de sanctifier ceste isle y célébrants la messe en actions de grâces d’un voyage si heureux. Nous applicames trois messes l’une pour notre Roy très chétien et Monseigneur l’Eminentissime Cardinal Duc de Richelieu notre fondateur, la seconde pour Monsieur le Président Fouquet et Messieurs de la Compagnie d’Amérique et la troisième pour vostre noviciat et tous les bienfaiteurs quinous ontassistédeleur charité ennostre voyage..." Les colons s’installent progressivement. Les 2 chefs ne s’entendent guère… L’Olive fait construire le fortin St Pierre à l’ouest de la Pointe Allègre au confluent de la rivière Vieux-Fort, Du Plessis s’installe avec une partie de la troupe à l’est de la Pointe Allègre, où il fait construire son fortin Petit Fort. Selon le R.P. Pelican : " Messieurs nos capitaines ont pris chacun le lieu de leur habitation qui n'est pourtant esloigné l'une de l'autre que de la portée d'un mousquet. A celle de Monsieur l'Olive nous fismesuneprocessionlejourdelaVisitationdeNostre Dame qui fut le quatrième de notre arrivée au mesme lieu. Il a faict dresser un fort qui est bien clos et environné proche d'une rivière douce." " Nous fimes dresser dans ce fort le dimanche huistième de juillet une Croix d'un beau boys rouge et fort dur de ta hauteur de quinze pieds, laquelle nous saluammes et honnorames d'une seconde procession... Quant à nostre demeure nous sommes logés sur un petit fort qui est à la vue de la mer tout contre Monsieur L'Olive. II nous y a faict accomoder tout ce qui est nécessaire pour nostre logement mais d’autant qu'il espère transférer sa demeure plus haut à un lieu plus commode qui est esloigné de deux ou trois lieux de celuy où il est à cause d'une rivière d'eau douce où les barques peuvent entrer aisément.Il différera de nous bastir le couvent désirant nous avoir toujours à ses costés et proches de luy partout où il sera et ainsy nous a il promis que transférant sa résidence au lieu susdit il nous ferait bastir un petit monastère" Selon le R.P. Breton, au lendemain du débarquement les Dominicains s’étaient divisés : les PP. Pélican et Bruchet, dit de Saint-Dominique,avaient suivi L’Olive et avaient construit une petite chapelle : Notre-Dame du Rosaire. Les PP. Breton et Nicolas Griffon, dit de La Croix avaient logé près de Du Plessis et édifié un oratoire en l’honneur de Saint-Hyacinthe. Le 18 aôut, le R.P. Pelican envoie une lettre à son supérieur le R.P. Carré, dont nous avons déja vu quelques extraits et conclut : " Le Révérend Père deLaCroix est allité d'une petite fièvre lente. Je crois que nous reprendrons tous nos forces si tost que nous aurons peu un peu séiourné avec repos à nostre petite habitation d'oùde par tous les trois Révérends Pères Nicolas de Sainct Dominique, Raymond Breton et Pierre de La Croix nous prions incessamment pour Vostre Révérence que nous saluons très affectueusement ..." De fait, et malgré un aller retour à St Christophe, la famine s'installe... Du Plessis, qui était pour une cohabitation à l'amiable avec le peuple Caraïbe, meurt le 4 novembre, la cérémonie d’enterrement est célébrée par le R.P. Pélican, qui va bientôt rentrer en France, malade, pour demander de l'aide...
Le 15 septembre, Pierre Belain, sieur d'Esmanbuc, prend possession de la Martinique : "… j’ai pris pleine et entière possession de ladite île de la Martinique pour et au nom du roi notre sire, Monseigneur le cardinal de Richelieu et nos seigneurs de la Compagnie et j’ai fait planter la croix et arborer le pavillon de France, le tout pour l’augmentation de la foi catholique, apostolique et romaine et pour faire profit de ladite île au roi et à nos dits seigneurs suivant les commissions à nous octroyées par Sa Majesté... "
1636 :Sur la demande de D'Esnambuc et après intervention de Louis XIII, La Sacrée Congrégation de laPropagandaFidefinit par autoriser les Capucins de Normandie à remplacer à St Christophe, les prêtres séculiers et les aumôniers de vaisseau, qui n'étaient que de passage.
Le 4 juin, lors de la réunion des directeurs de la Compagnie,"M. Foucquet a dict que cy devant il avoit esté résolu qu'il seroit envoyé en l'isle Saint-Christofle des pères Capucins du moins jusques au nombre de six, sans qu'il ayt esté lors pourveu à leur entretien et nourriture; et d'aultant qu'il est à propos de les faire passer au plus tost, qu'il seroit bon de leur aulmosner quelque somme pour ayder à leur nourriture, a esté résolu qu'il sera donné par aulmosne aus d. pères Capucins 400 livres, pour estre employées en vivres pour porter en la d. isle pour leur nourriture, attendant qu'ils puissent recueillir des fruictz et avoir faict des vivres dans les terres qui leur seront baillées. Qu'il leur sera encore donné un mandement sur le commis de la Compagnie pour leur fournir jusques à mille livres de pétun pour avoir ce qui leur sera nécessaire sur les lieux. Qu'il leur sera procuré par la Compagnie jusques à 300 livres pour employer en ornemens d'esglize et choses nécessaires pour la célébration du service divin. Et qu'il sera escript à M. d'Esnambuc qu'il leur donne un lieu propre pour les loger et ceux qui seront envoyez cy après dans la d. isle avec une quantité de terres capable pour y faire des vivres pour leur nourriture, et que proche du d. lieu il soit désigné une place pour y faire bastir une esglize. A esté aussy résolu d'escripre au d. sieur d'Esnambuc qu'il face donner aus d. pères Capucins un autre lieu proche de l'habitation du sr Du Halde ou à la Poincte de Sable pour y faire bastir aussy une esglize et logement pour les d. pères et des terres pour y faire des vivres, estant nécessaire qu'ils se séparent en deux ou trois différents endroits de l'isle pour plus facilement subvenir aux malades, les consoler et leur administer les sacremens." 6 Capucins - Raphaël de Dieppe,JosephdeCaen,Archangedu Havre, Jean-Baptiste deAndelys,Pacifiqued’Eu etPaulinde Tours- quittent ainsi la France pour St Christophe en juillet.
1637 : Les Capucins Daniel de Canouville et Protais de Caen arrivent en Guadeloupe en plus des Dominicains, réclamés par L'Olive. Jacques Berruyer, l'un des directeurs de la Compagnie, se plaint au Supérieur des Dominicains le R.P. Carré, de n'avoir pas été informés du retour de 3 des 4 Dominicains arrivés en Guadeloupe avec le R.P. Breton, qui est resté seul...
1639 :Sous l’impulsion du Président Fouquet,lassé des conflits entre Dominicains et Capucins, et malgré la demande du gouverneur Du Parquet de Dominicains ou de Capucins, la Compagnie décide de faire passer à la Martinique des Jésuites, en leur octroyant des privilèges sensiblement équivalant à ceux des deux autres ordres.
LeSupérieurdesJésuitesdésigne 3 religieux,les R.P. CharlesHempteau et Jacques Bouton et le Frère Barthélemy Leclerc, qui s’embarquent le 25 novembre 1639 à Nantes à destination de la Martinique. A leur arrivée, la Compagnie rappelle au gouverneur Du Parquet et aux Jésuitesqu’ils sont là pour œuvrer à “la gloire de Dieu et à l’instruction des François et des Sauvages"
1640 : La Compagnie envoie en Guadeloupe 6 Dominicains dont 3 frères convers, selon le R.P. Breton : "le R.P. Nicolas de la Mare, religieux du couvent de Sens, docteur de Sorbonne, avec le R.P. Jean de Saint-Paul et le R.P. Jean-Baptiste de Sainte-Ursule,prestres,et trois frères convers, le Fr. Jacques des Martyrs, le Fr. Nicolas de Saint-Dominique et le Fr.Estiennede l’Assomption qui n’estoit pas encorprofès" . A noter que Jean Baptiste de Sainte-Ursule signera ses oeuvres "Jean-Baptiste du Tertre", son patronyme civil... Ils partent de Dieppe le 7 janvier et arrivent en Guadeloupe le 4 mars après être passé saluer en Martinique le gouverneur Du Parquet. Les Dominicains disposent de 5 lieux de culte, 2 églises avec un culte permanent : Notre-Dame-du Rosaire et Saint-Hyacinthe à Basse-Terre, et 3 chapelles avec un culte intermittent : Saint-Joseph au quartier des Vieux-Habitants, Saint-Jean-Baptiste à la Grand’anse du Vieux Fort, et de Tous-les-Saints à Sainte-Marie. Ils baptiseront l'année suivante 60 noirs à Ste Hyacinthe.
1641 : Un premier traité de paix est signée avec les Caraïbes qui abandonnent la Guadeloupe et acceptent de se retirer à la Dominique, qui leur est attribuée. Selon le R.P. Breton, " le 5 d’octobre...arrivèrentdeuxprestres:LeP.Vincent Michel, et le P. Dominique deSainct-Gilleset le frère Charles deSainct-Raymond,convers". Le R.P. Breton est - enfin - envoyé à sa demande à la Dominique par son supérieur Nicolas de la Marre avec le frère Charles de St Raymond pour aller convertir les Caraibes : le gouverneur Aubert n’est pas d’accord, l’accueil des Caraïbes est difficile , mais malgré tout, le R.P. Breton va faire plusieurs séjours au milieu d’eux, on lui doit le premier dictionnaire français/caraïbe publié en 1665… Le Supérieur le R.P. Carré envoie en Guadeloupe 2 Dominicains en remplacement Vincent Michel et Dominique Picard.
1643 : Dans une lettre adressée au pape Urbain VIII, Louis XIII souligne que l’évangélisation des Caraibesnécessite des “personnes dont la croyance soit aussi irréprochable que les mœurs, et la piété aussysignalée que le courage”, faisant l'apologie de la branche française des Dominicains réformés...
1645 :Charles Houël revient de France le 25 mai, accompagné entre autres du R.P. Capucin Pacifique de Provins, qui avait été nommé Préfet Apostolique des Terres Françoises de l’Amérique dès 1642. La Compagnie le charge de fournir 4 "des premiers nègres qui viendront en ladite île" pour les Dominicains de Guadeloupe.
1646 : Philibert de Nouailly, écuyer, sieur de la Tour de Néron, obtient de la Compagnie le gouvernement de la Grenade le 10 juillet avec entre autre la mission de " l'instruction des Sauvages et administration des sacrements aux habitants " Il écrit au Provincial (Supérieur) Carme de Touraine Léon de St Jean : " Ayant recu de nos seigneurs des Indes une commission pour une nouvelle collonie dans les Indes Occidentalles de l'Amérique et en particulier estant establi gouverneur de l'une des plus belles et des meilleures isles de ces cantons appellés la Grenade, j'ay cru ne pouvoir plus dignemant m'acquitter de cette charge qu'en pourvoyant aux moyens d'y procurer la gloire de Dieu et l'extention du nom de Jésus-Christ ; et par une rencontre dont je m'estime heureux le Révérand Père Ambroise de Ste-Anne religieux Carme de vostre province de Touraine et ordinaire de votre famille de Tours estant a Nantes par occazion et ayant parlé avec lui de mon dessein, ma fait paroistre une grande ouverture de coeur et un zelle affectionné pour l'instruction des Sauvages (dont je suis expressement chargé par ma commission) et pour le maintien de la piété des principaux de mes associez qui font voyage en ces cantons esloignés qui desire estre assistez pour leur salut dont plusieurs ont entretenu le d Révérand Père Ambroize et qui seront ravis avec moi d'avoir l'honneur de l'avoir pour directeur et vous en suplie par celle-cy de le leur accorder et avoir agréable qu'il entre dans not compagnie "
Partis de Nantes le 18 juillet, De Nouailly arrive en Martinique le 31 août avec les 2 R.P. Carmes, Ambroise de Ste Anne et Maurile de St Michel, dans le but d'évangéliser la Grenade. Le R.P. Maurile de St Michel constate que les 5 Jésuites ont quitté la Martinique dans ce contexte de guerre civile entre les partisans de Poincy ou de Patocle dans nos isles... De Nouailly tarde à prendre possession de la Grenade, insatisfait du contrat, il part demander de l'aide à De Poincy à St Christophe, toujours accompagné de nos 2 R.P. Carmes. De fait, il laisse le champ libre à Du Parquet qui va s'emparer de la Grenade par les armes, avant de l'acheter en 1650...
De Poincy garde à St Christophe les 2 Carmes : Ambroise de Ste Anne et Maurile de St Michel sont chargés de 2 églises et de l'hôpital.
Les Carmes, arrivés aux Isles d'Amérique pour la colonisation de la Grenade, s'établissent d'abord à St Christophe.
1647 : Le R.P. Maurile de St Michel est allé voir les catholiques de St Eustache pendnat que le R.P. Ambroise de Ste Anne est allé en Martinique, les 2 Carmes se retrouvent à St Christophe, ils s'occupent en priorité à "faire abjurer l'hérésie de Calvin" aux Protestants. Ils recoivent leur contrat d'établissement officiel de Robert de Lonvilliers, neveu de De Poincy :
Le R.P. Maurile rentre en France sur un navire de Honfleur rendre compte de la gestion de leur mission. Il traversela France avec 2 autres R.P., d'abbaye an abbaye jusqu'à Aix en Provence, où ils sont reçus par le Révérend Général des Carmes qui leur donne une obédience avec le pape. Ils embarquent à Toulon pour Rome.
La Mission des Pères Dominicains en Guadeloupe compte 5 missionnaires : le R.P. Raymond Breton, arrivé à la Guadeloupe en 1635, le R.P. Jean Dujan, arrivé en 1640, le R.P. Armand de la Paix, arrivé en 1643, devenu le Préfet de la Mission, le R.P. Mathias du Puis, arrivé en 1644 et le R. P. Picart arrivé en 1641, qui se meurt après une longue maladie. Le R.P. Armand de la Paix aidé par le R.P. Breton, envoie le 21 novembre à sa hiérarchie la : " Relation de l'isle de la Guadelouppe faite par les Missionnaires Dominicains à leur Général "
1648 : A St Christophe, arrivée des R.P. Cosme et Innocent.
Houël envoie Leroy du Mé prendre possession des Saintes avec une trentaine d'hommes, le R. P. Dominicain Mathias du Puis y arbore la Croix le 18 Octobre : " R. P. Mathias du Puys, dictus à S. Ioanne, Crucem Redemptionis nostræ in insula Guadalupœ, adjacente, quœ les Saintes vocatur, fixit, in Comitatu Domini du Mé, qui eiusdem insulæ fuerat gubernator electus & delegatus." La petite colonie ne durera que quelques mois du fait de la sécheresse et de l'absence d'eau douce...
Yves Le Cerqueux dit Lefort, ancien lieutenant de Du Parquet, gouverneur de la Martinique, a du quitter la Martinique suite à un violent conflit, il s'est réfugié chez Houël . Ce dernier l'envoie occuper Mariegalande avec une cinquantaine d'hommes. Ils arrivent le 8 novembre, s’installent sur ce qui deviendra Vieux Fort et construisent un petit fortin en bois. Pas d'écrit évoquant la présence d'un prêtre dans cette première colonie...
1649 : La Compagnie des Isles d’Amérique a fait faillite, le 4 septembre Jean de Boisseret signe le contrat de vente de " la dite isle de la Gardeloupe et isles adjacentes la Desirade, Marigalande et Xaintes ". De Boisseret devait cèder à son beau-frère Charles Houël la moitié de son acquisition, mais ce dernier va entrer en conflit avec lui pour la possession des îles… A Basse-Terre, Houël s’attribue tous les droits, nomme les juges et décide d’un droit de capitation de 100 livres de tabac par habitant au-dessus de 10 ans. Il se brouille avec les 4 pères Dominicains en place qu’il expulse et décide de les remplacer…
1650 : Houel fait d'abord venir 2 pères Augustins, Égide Gendron et René Labourdais, ils vont rester quelques mois et mourir l'un après l'autre, les sacrements leur seront donné par le R.P. Philippe de Beaumont, seul dominicain restant... En mai, les lettres patentes autorisent "l’Etablissement des Religieux Carmes de la Province de Touraine aux Isles de l’Amérique".
1651 : A St Christophe, arrivent 4 nouveaux Pères Carmes tourangeaux : Athanase de Sainte-Radegonde, Thomas du Saint-Sacrement, Joseph de Saint-Claude et Jacques de l’Annonciation. Ce dernier meurt rapidement des fièvres, seuls les 3 premiers partent pour la Guadeloupe, où ils arrivent le 2 février : devant l’accueil des habitants et l’insistance de Houël, ils décident de s'y établir, Joseph de St Claude devenant le Supérieur. Le R.P. Carme Ambroise de Ste Anne, devenu vicaire général du Carmel pour les Isles, vient de St Christophe pour négocier avec Houël leur établissement. Le contrat ou " Acte de fondation entre Carmes, les Habitants et les Seigneurs fondateurs " est signé le 5 mars. Les Carmes reçoivent une église dans le bourg de Basse-Terre " qu’il faut finir de construire ", un couvent proche de l’église " pouvant accueillir 4 religieux avec jardin et verger ", une habitation sur les étages de la montagne de Torfou, 2 nègres esclaves, plus des facilités pour en acquérir d’autres, enfin des "droits de moulin à sucre et autre manufacture ". Leur habitation disposera rapidement de 2 moulins à sucre (à bêtes) et d’une marmite à eau de vie (alambic). En échange, les Carmes ont pour obligation de célébrer les offices religieux, d’administrer les sacrements et de catéchiser. En sus, 2 services solennels doivent être célébrés chaque année à la mémoire des Seigneurs fondateurs Charles Houël et Jean de Boisseret " à perpétuité "… Le 21 août, Ambroise de Ste Anne et Joseph de St Claude font en plus acquisition pour les Carmes d'une habitation à " Grand Anse de la Cabesterre" auprès d’un Flamand, Adrain Ture, une partie des 15.000 livres de pétun de la vente seront avancées par Houël.
1652 : Un 4ème navire doit amener 2 nouveaux Carmes aux Isles : le R.P. Léon meurt pendant la traversée et le R.P. Aubin 4 jours après son arrivée à St Christophe...
Le R.P. Carme Maurile de St Michel publie au Mans son expérience dans : " Voyage aux Isles Carmercanes en l’Amerique qui font partie des Indes Occidentales et une relation diversifiée de plusieurs Pensées pieuses et d'agréables remarques avec l'etablissement des RR. PP. Carmes Reformez de la Province de Touraine es dites isles " avec la permissiondu " Reverendissime Pere General, Prater loannes Antonius Philippinus, Sacra Theologia Magister "
Tout en justifiant la malédiction des noirs et l’esclavage par l’histoire biblique du fils maudit de Noé Cham, il semble avoir voulu un esclavage plus humain…voire l’émancipation : " J’ai toujours exhorté nos Français à traiter humainement et chrétiennement les pauvres Nègres, louant grandement ceux qui, en ayant retiré ce qu’ils leur ont coûté, leur donnent liberté en vue du christianisme "
A St Vincent, mission d’évangélisation des Jésuites avec les Pères Guillaume Aubergeon et François Gueimu.
1654 :Les Pères Dominicains de la Mission de Guadeloupe demandent au congrès de la Propaganda Fidei le soutien du Pape pour l'extension de leurs missions aux Antilles : "Ostium enim Evangelio. fratribusque Praedicatoribus apertum est magnum et evidens iis in partibus... turn ab Indis Insularum Dominicae, Antigae, Granatae, S. Luciae, Martinicae[Fratres Praedicatores] humane habeantur et in pluribus locis desiderantur ; qui si S. Sedis authoritate et benedictione confirmentur et animo et numero crescent. "
Les 2 Jésuitesenmissionà Saint-Vincent,GuillaumeAubergeonetFrançoisGueimu,sonttuésenplein officepardesCaraibes...
1655 : Le Père Jésuite Pierre Pelleprat publie " Relation des missions des P.P. de la Compagnie de Jésus dans les Isles et dans la terre ferme de l'Amérique Méridionale ". Il raconte comment au début de 1654, alors qu'il se trouvait aux Grenadines au retour d'un voyage à la Terre Ferme, il vit sa barque assaillie par 300 guerriers qui dans 6 pirogues se rendaient à la Grenade : son salut fut dans ses voiles... A son arrivée dans les isles, il s’étonne de rencontrer des François "dans une entière ignorance des mystères de notre foi", il critique l'activité des missionnaires "du commencement, ils menèrent des prêtres, mais de mauvaise conduite, et peu propres pour régler un ramas de tant de sortes de gens, hommes et femmes" Il décrit les isles qu'il a visité : St Christophe, la Martinique, St Vincent et Marie Galande : " Cette dernière est la plus petite de toutes, mais aussi est-elle la plus riante et la plus agréable et c'est pour ce sujet que les Espagnols l'ont nommée Galande"...
" J'y passay aumois de novembre dernier pour y administrer les Sacremens à la colonie Françoise, qui depuis long-temps n'avoit pas veu de Prestre : j'y exposay le S.Sacrement pour l'oraison de quarante heures, et leur fis gaigner l'Indulgence que le S.Siege nous a donnée en faveur de ces Missions. Ces pauvres gens qui avoient esté privez depuis quatorze ou quinze mois de sermons, de Messes, et de Sacrement ne me laissoient pas manquer d'occupation; ils eussent bien désiré m'y retenir, mais j'étois obligé de retourner à la Gardeloupe..."
1658 :Le pape Alexandre VII nomme le R.P. Fontaine préfet de la mission des Dominicains en Amérique. Le R.P. Philippe de Beaumont, supérieur des Dominicains en Guadeloupe, obtient par contrat de Houël une concession entre la rivière Saint-Louis et le Baillif avec 26 Noirs pour le moulin à sucre.
1660 :Le R.P. Claude de Saint-Jean, vicaire Carme des Isles d’Amérique, affiche clairement son hostilité envers les Dominicains : " les R. Peres Jacobins estans allés faire une mission aux sauvages de la Dominique ne veulent pas souffrir que nous y allons a moins de dependre d'eux. Je ne connoy rien dans toutes les procedures de tous ces bons peres ; si c'est par un mouvement du St Esprit, j'avoue que toute ma Theologie est renversée "…
Mariegallante appartient désormais à la famille De Boisseret. La dame Magdelaine Houel, veuve De Boisseret la donne à ses 2 fils Charles de Boisseret, marquis d’Herblay et Jacques de Boisseret, marquis de Téméricourt.
Le 6 novembre, les fils de Boisseret font établir les Carmes " Religieux de la Bienheureuse Vierge Marie du Mont Carmel " à Marie Gallante au nom de leur mère Magdelaine Houel et de leur oncle le Chevalier Robert Houël :
" Pardevant Simon Pigeon et Pierre Manicher, nottaires gardenottes jurez establis en partie de l'Isle Gardeloupe ... se sont comparus en leur personne Messire Charles de Boisseret, Chevalier Seigneur d'Herblay, Seigneur et propriétaire de Mariegallante et Messire Jacques de Boisseret Chevalier et Seigneur de Téméricourt aussi Seigneur en partie des Isles, soy faisant et portant fort pour Dame Magdelaine Houel dame de Boisseret, de Messire Robert Houel, Chevalier Seigneur d'Estrechy aussy Cosseigneur et le Révérend Père, frère Claude de St Jean, Commissaire général et Vicaire provincial des Carmes Missionnaires de la Province de Touraine... a fondé et fonde par la présente pour d'huy et en avant et a toujours un Couvent aux Religieux du dit ordre dans l'Isle Mariegallante " " Pour la construction du dit Couvent s'oblige le dit Seigneur d'Herblay... donner aux dits religieux la quantité de 20.000 livres de pétun (tabac) à payer scavoir 6.000 livres au jour de la St Jean Baptiste 1662 et 7.000 à la St Jean en suivant et 7.000 restants à la St Jean 1664 " S'oblige le dit Seigneur fondateur fournir aux dits Religieux en attendant que le dit Couvent soit basti une caze en bois de sciage de longueur d'environ 20 pieds" " Donne le dit Seigneur aux dits Religieux une place de 3 à 400 pas en quarré a chacune des 2 chapelles qu'il sera besoin de bastir pour la commodité du peuple" " A chacun des dicts religieux quy deserviront en la ditte isle donne le dict seigneur fondateur par chacun an six mil livres de petun bon et loyal ou six mil de sucres ou valeur d'iceux en marchandise au choix des dicts religieux " ou 10 esclaves par an, " selon le choix du seigneur ". Ils obtiennent les droits de moulin à sucre, d’indigoterie et des facilités pour l'acquisition des esclaves. En échange, ils ont l’obligation de fournir de fournir le nombre de religieux nécessaires "selon la volonté du Seigneur", d’administrer les offices, les sacrements et les enterrements, de catéchiser les habitants.
Le 1er prêtre Carme, le R.P. Victorin de Saint Michel, arrive dans l’île début décembre, on lui fournit 10 esclaves.
1661 : Le R.P. Victorin meurt moins d'un an après son arrivée, le R.P. Séraphin de Saint Pierre écrit sur lui : "…R P Victorin de St-Michel dont j’apris hier, en sortant du confessional pour aller dire la grande messe, la mort ou plustost je croy le sommeil des Justes. Il mourut le 28 novembre 1661 a Marigallande ou il estoit en mission apres y avoir bien travaillé pour le salut de ces pauvres habitans presque un an… Il est mort de fatigue sans presque ressentir de mal avec un visage joyeux et tres content, faisant pleurer tous les habitans de voir si tost mourir celuy dont Dieu c’est servi si souvent pour leur donner la vraye santé et vie de leurs ames "…
Son successeur le R.P. Carme Ferdinand de Saint Claude arrive et fourni bientôt un " Estat de nostre maison de Marie Galande du 13me de novembre 1661 que j'y suis veneu pour y demeurer ":
" Une place environ 150 pas par 200 plantée en maignoc, patattes et pétun" " Un petite cazze palissadée de rondins couverte de rozeaux, plus 6 naigres, scavoir 3 naigres et 3 naigresses" " Pour les meubles : 1 pettitte table, 6 escabeaux (tabourets), 1 grand coffre et 1 petit, 1 cave de 15 flacons, 1 tasse en argent, 2 chaudières (casseroles), 1 grande et une petite, plus 2 platines pour faire la cassave, quelques serpes et haches, 1 douzenne de serviettes, plus 6 serviettes de lin et 1 nappe, plus 1 couverture et 1 hamac " " Provisions : 1 baril de boeuf plus 1 demi baril de lard " " Dettes de la maison : environ 4 mille de pétun" Il écrit un peu plus tard : " Presantement j'ay bien de la peinne estant tout seul et ay esté malade de fatigue, il me faut porter les ss sacrements aux malades jusques a quattre et ceinq lieue, je ne croy pas pouvoir resister longtemps s'il ne nous viens du secours " Arrive bientôt un 2ème R.P. Carme Claude de St Jean.
1662 : Les Carmes se structurent pour lancer leur sucrerie : le R.P. Carme Ferdinand de Saint Claude nous fournira en 1668 les " Acquisitions et augmentations faites en nostre maison de Marie-galande par moy Ferdinand de St Claude Supérieur de la dite maison "
Il a fait l’acquisition le 9 octobre " d'un magasin de Sylvestre Roussel, situé à la " Basse-Terre de cette Isle "(futur Grand Bourg), pour la quantité de 3.600 livres de sucres, suivant contrat passé par-devant Mr Legris, notaire à la Gardeloupe ".
1663 : Le 14 avril, le R.P. Ferdinand de Saint Claude fait acquisition d’une "place du nommé Paul La Gaitte située à la Grande Ance, de 100 pas de large et 1000 de haut, pour la quantité de 4500 livres de pétun, fait par échange d’une autre placede la valeur autant, suivant contrat passé devant Mr Luce, notaire". Le 23 novembre, d’une "place située à la Grande Ance de 200 pas de large sur 1.000 de haut, du nommé Nicolas Alexandre pour la quantité de 3000 livres de sucre, suivant contrat qui se trouvera chez Mr Luce, notaire".
1664 : Le 10 juillet, la Compagnie des Indes Occidentales a racheté les îles à leurs seigneurs respectifs, dont Marie-Galante à Magdelaine Houël, veuve de Jean de Boisseret et remariée à Jean Bochart, seigneur de Champigny.
Les Carmes augmentent leurs terres, avec un nouveau terrain de 50 pas de large sur 1.000 de haut déjà défriché, acheté à Henri Gaisnon dit Lacavé pour 6.000 livres de sucre.
1665 : Le 6 mars, Mr de Chambré prend possession de la Guadeloupe au nom de la Compagnie : les "Eclésiastiques " doivent prêter serment de fidélité au Roy et aux "Messieurs de la Compagnie", tout comme la Noblesse, le "Tiers Estat" et le Conseil souverain...
Le 17 mars, Prouville de Tracy émet le "Reglement pour le gouvernement et police" de la Guadeloupe et dépendances, il précise : " On fera venir au plus tôt qu’il sera possible…des prêtres de bonne vie et mœurs et de capacité requise pour establir aux Cures…"
A Mariegalande, le bourg prend forme avec la maison du Gouverneur, l’habitation des Carmes, le Fort et ses soldats. Les artisans se regroupent près du port et des " magasins de la Compagnie ", où arrivent les cargaisons.
Les Carmes sont toujours en expansion : le nouveau Révérend Carme Ignasse de l’Assomption s’engage à acheter à Pierre Rioud un terrain au quartier de la Savane de 100 pas de large sur 1.000 de haut pour 22.000 livres de sucre… La sucrerie des Carmes au quartier de la Savane démarre, y seront recensés l’année suivante un commandeur, un chirurgien, 4 serviteurs blancs et 10 esclaves…
En revanche, ils n’avaient pas fait enregistrer leur donation de fondation en 1660, et la Compagnie, nouvelle propriétaire de l’île, veut s’approprier leur habitation initiale, il écrit à son Supérieur : " Comme le vaisseau porteur de la presante doit aborder a Nantes je vous envois une copie de nostre contract de fondation de Mariegalande et des oppositions que nous a signifié Mr le Marquis de Temericourt, gouverneur de cette isle-la, afin de les envoyer au Rd Pere procureur sindic de Paris pour nous obtenir des lettres d'evocation au grand conseil, je vous prie de faire consulter nostre affaire par quelque docte advocat et de nous mander ses sentimens. Ce que je trouve de mauvais dans le proces c'est que nos peres n'ont pas faict ratifier le contract par madame de Champigny mere de monsieur le marquis de Temericourt. Il est bien difficile de le faire a present ratifier d'autant que la ditte dame a vandu depuis un an l'isle de Marigalande a messieurs de la Compagnie, depuis je trouve aussy de la collusion en l'opposition qui nous a esté signifiée, nous ayant esté faicte apres que la terre est vandue et il y a encore sept ans d'intervalle entre l'opposition et signification, comme je n'entand pas les procez et les affaires je suis bien aised'evoquer au grand conseil afin que nos peres qui sont verséz en ces matieres puissent conduire le tout avec prudence et conseil. Si tost que j'auray receu les lettres d'evocation, j'envoyray en France du sucre pour fournir aux fraiz du procez"… Il leur faudra 5 ans de débats juridiques pour avoir raison…
1667 : Les Carmes poursuivent leur expansion, avec le 17 août, l’achat devant notaire par le R.P. Ferdinand de 3 terrains supplémentaires au quartier de la Savane devant Jean Baptiste Parise, notaire à la Gardeloupe : - l’habitation de Robert Jeulin de 50 pas par 1.000 pour 12.500 livres de sucre - l’habitation de Jacques Le Tellier de 37 pas et demi sur 1.000 pour 6.000 livres - l’habitation d’Anthoine Bidault de 37 pas et demi sur 1.000 pour le même montant.
Ainsi, l’ensemble de terres acquises depuis la " fondation " de 1660 occupe près de 180 hectares…
En parallèle, ils font une " Augmentation de naigres " le 3 mai en achetant à " Mr Girardain 4 nègres, à scavoir Jean et sa femme, Mengel et Pettre, pour la quantité de 18000 de sucre " devant Legris, notaire en Gardeloupe, puis bientôt 3 négresses supplémentaires pour 6.000 livres de sucre et 2 nègres supplémentaires pour aussi 6.000, ce qui nous donne un montant de 3.000 par homme et 2.000 par femme…
1668 : Le Frère Carme Ferdinand a rédigé le 13 janvier : " Acquisition et augmentation faites en nostre maison de Marie Galante par moi Ferdinand de St Claude, Supérieur de la dite maison..." , documents déja vus pour les acquisitions de Carmes depuis 1661. Il fournit de plus une comptabilité un " Estat de ce qui mes deubt " qui recense les créances des autres habitants, elles se montent à 42.427 livres de sucre réparties sur 11 habitants dont De Surmont. Un " Estat de ce doibt la Maison de Marie Galande " expose les dettes des Carmes, qui se montent elles à 30.088 livres de sucre envers 16 habitants, marins (dont le maître de barque du gouverneur) et autres religieux… Enfin 11.736 livres de sucre de " Provisions que j’ai faites à la Gardeloupe non payée et non consommée ", soit un équilibre des comptes quasi parfait…
Il fait aussi l" Invantere des bestiaux et autre chose principalle de nostre Maison de Marie galande" :
Après l'inventaire des animaux, il recense : " Premierement : - 1 moulin parfaict - une sucrerie monsté de 4 chaudière avec refredissoir quillière et escumoire - plus un autre équipage de 4 chaudière avec refredissoir quillière et escumoire - 1 chaudière a eau de vie avec un chapitteau - 1 poelle a faire de la farine, 2 platine a faire de la cassave, une douzene de grages Ustencille de l'offisse : - 6 à 8 plats en granit, 6 à 8 assiette - 1 douzenne de quilliere d'estain, 6 chaudieres (casseroles), 1 gris? - 5 grand fusils et 2 mousquetons " La page suivante s'intéresse aux " Batiment et Meubles " puis aux " Cordages " :
" Premierement : - 1 case de cherpante couverte d'essentes de 30 pieds de long avec 3 chambres - 1 cuisine batie de pierre - 1 magazin au bout d'autre appartenance ? Meubles : - 1 grand coffre de bois de ? - 1 autre moindre d'acaiou - 1 autre plus petit - 1 coffre de medicament - 1 douzenne et demi de serviette tant bonne que meszante ! - 1 nappe et 6 serviettes de lin - 1 nappe plus 10 linceux - 2 matelas, 2 pailliasse - 1 petite tasse d'argent, une d'estain plus une - 1 grande cave de 15 flacons garnie, plus 2 autre cave de 12 flacons garnie, plus 1 plus petite de 6 flacons garnie - 1 hamac double " Les cordages retrouvent 3 tailles de cordages, des lignes de pêche, un "roulleau de plomb en plaque pesant environ 500 livres", 12 " quanots pour la vinaigrerie (distillerie) que pour recepvoir de l'eau pour l'usage de la maison " On entrevoit mieux leur mode de vie...
Le 19 janvier, le Frère Hyacinthe de la Ste Trinité, Vicaire provincial des Carmes de l'Amérique, fait sa 1ère visite aux Carmes de Mariegalante. Avec le Frère Ferdinand de St Claude, ils nous fournissent une " Estimation faite seullement des choses principales de la ditte Maison " :
On voit que l'ensemble des habitations est estimé 63.350 livres, les naigres 32.000 livres, les chevaux, boeufs, vaches 55.000, le moulin à sucre (à bêtes) 10.000, les 2 batteries de chaudières et l'alambic 25.000 : l'ensemble de leurs biens est estimé 185.500 livres.
Le 25 juin, le R.P. Ferdinand écrit au Supérieur des Carmes de Touraine : " J'avois quelque peu de feilles de caret (carapaces de tortues) que je devois emporter avec moy pour en faire quelques presants ou vous auriez eu la meilleure part mais mon voiage estant manqué et ne pouvant en estre moy-mesme le porteur, ayant trouvé l'occasion par ce petit navire de messieur Marion de Nantes, je vous l'ay voulu adresser pour en disposer comme bon vous semblera. Je l'ai mis dans un petit cart il peut y en avoir aprochant de vingt livres seulement. Je vous prie d'avoir la bonté de nous envoier quelques supplements et processionneaux, un ensansoir et une croix de cuivre avec un benistier quelques beaux noels. Je prie encore vostre Reverance de vouloir nous adresser quelque honneste marchand a qui nous puissions seurement adresser quelques marchandizes pour avoir nos commoditez. Maintenant nous avons Dieu mercy honnestement de quoy pour estre bien autant que le pais le peut permettre, et suis sur le point de faire bastir une belle eglize a la grande ance de Mariegalande et pour cet effect j'auray bien bessoin de vostre asistance pour procurer quelques charitez en Frence des gens de bien. J'esperois que mon voyage m'auroit beaucoup servi et principalement pour amener des ouvriers comme charpantiers, menuisiers, tailleurs de pierres, un bon serrurier et un bon sirurgien, et je supplie tres fort vostre Reverance que si par son moyen il s'en rencontroit, de me les adresser et mesme de faire le marché pour un an ou pour deux et suivant qu'ils seront habilles passer marché avec eux que je tienderay pour trois mille de sucre asseuré en France s'ils sont bons ouvriers. Je prie encore vostre reverance d'avoir la bonté de faire tenir les lettres que je luy envois a leur adresse et presantement que nous avons plus de liberté et d'occasions, je vous recriray plus souvent et envoiray de quoy satisfaire a ce que je vous demanderay. A Dieu, je salue avec vostre permission les religieux qui sont de nostre connoissance, me recommandant a leurs bonnes prieres et aux vostres, et suis de tout mon cœur "
Le 12 novembre, tremblement de terre : 2 des 12 sucreries sont détruites à Marie-Galante. Le R.P. Ferdinand, voyant la supériorité des bâtiments en bois lors du séisme, demande à son supérieur en Touraine : " ll ne nous fait aucun tordt par la grace de Dieu que la peur, nostre couvent estant basti de charpante n'a eu aucun mal ce qui obligera maintenant ces habitants des isles a ne point bastir autrement. C'est pourquoy s'il ce trouvoit quelque bon charpantier qui voulust venir ycy pour travailler pour nous, je luy donnerois bon gage jusques a cent escus et quatre cent franc par année car j'ay encore dessein de faire bastir un beau couvent sur nostre habitation de la grande ance qui sera s'il plaist ‚ Dieu un jour nostre principale maison dans ceste isle ; un bon menuisier et taillandier ou marechal me seroit fort necessaire je leur donnerois bons gages et s'il s'en trouvoit je prirois vre Rce de les envoier et passer marché avec eux pardevant notaire " " Nous vous demandons pour nos estrennes des grennes potageres de touttes sortes car elles viennent fort bien dans nostre isle et les pois ausy de touttes sortes "
Le R.P. Hyacinthe de la Sainte Trinité, vicaire provincial résidant à St Christophe, écrit au Supérieur de Touraine : " Comme le vaisseau porteur de la presante doit aborder a Nantes je vous envois une copie de nostre contract de fondation de Mariegalande et des oppositions que nous a signifié Mr le Marquis de Temericourt, gouverneur de cette isle-la, afin de les envoyer au Rd pere procureur sindic de Paris pour nous obtenir des lettres d'evocation au grand conseil, je vous prie de faire consulter nostre affaire par quelque docte advocat et de nous mander ses sentimens. Ce que je trouve de mauvais dans le proces c'est que nos peres n'ont pas faict ratifier le contract par madame de Champigny mere de monsieur le marquis de Temericourt. Il est bien difficile de le faire a present ratifier d'autant que la ditte dame a vandu depuis un an l'isle de Marigalande a messieurs de la compagnie, depuis je trouve aussy de la collusion en l'opposition qui nous a esté signifiée, nous ayant esté faicte apres que la terre est vandue et il y a encore sept ans d'intervalle entre l'opposition et signification, comme je n'entand pas les procez et les affaires je suis bien aise d'evoquer au grand conseil afin que nos peres qui sont verséz en ces matieres puissent conduire le tout avec prudence et conseil. "
1669 : L’habitation-sucrerie des Pères Carmes cultive 35 carrés tout près du bourg, avec un atelier de 35 esclaves : elle avait coûté un peu moins de 200.000 livres de sucre pour les terres, les bâtiments, les esclaves et le bétail, elle produit en moyenne 50.000 livres de sucre par an.
Le R.P. Ferdinand est toujours le supérieur Carme de l’île, mais malade, le R.P. Hyacinthe de la Sainte Trinité écrit sur lui depuis St Christophe : " Je porte aussy grande compassion au Pere Ferdinand, il n y a que luy seul de prestre en l’isle de Marigalande ou j’apprind qu’il y a la beaucoup de malades ; je apprins depuis six semaines qu’il ne s’y portoit pas trop bien et il y a plus de deux mois que je ne receu de ses nouvelles, je crains qu’il n’y soit fort malade "
J. Ch. de Baas Castelmore, gouverneur général des Isles d'Amérique, prend une ordonnance le 1er août contre les protestants et les juifs : " ...Nous avons fait et faisons très-expresses défenses à tous Capitaines de Vaisseaux faisant profession de la Religion Prétendue Réformée, de chanter publiquement des Pseaumes, de faire des Mariages ni aucun autre exercice de leur Religion dans aucunes des Rades des Isles Françoises, sous telles peines que nous aviserons, sauf à faire leurs Prieres en particulier et à voix basse, suivant les Ordonnances du Roi , et d'en user aussi dans leur traversée, comme on fait dans les Vaisseaux de Sa Majesté; ordonnons à tous ceux qui font profession de ladite Religion dans lesdites Isles d'en user de même , et de ne se servir que de Commandeurs Catholiques, et lorsqu'ils n'en auront point pour prendre soin d'instruire leurs Negres, et de les faire prier Dieu soir et matin, de les envoyer tous les Dimanches et Fêtes à la Messe, aux Catéchismes, et aux autres exercices de piété, pour tenir la main à ce qu'ils fassent leurs Pâques, et pour avertir de bonne heure les Curés, afin qu'ils puissent administrer à temps les Sacremens, de prendre ce soin eux-mêmes à peine de mille livres de Sucre d'amende toutes les fois qu'ils y manqueront" " Défendons à tous les Juifs qui sont dans les Isles Françoises de faire le Samedi aucune cérémonie de leur Foi , d'obliger leurs Negres et Engagés à garder le Sabath, de travailler le Dimanche ni se montrer en public depuis le Jeudi-Saint jusqu'au Dimanche de Pâques, à peine d'être punis exemplairement "
Le R.P. Du Tertre écrit : "Dieu y a donné une grande bénédiction au zèle et au travail des Missionnaires, qu’il s’y rencontre présentement autant de vertu et de piété à proportion, que dans la France : car les Sacrements y sont fréquentés, et l’on y assiste aux Offices divins, avec une assiduité qui témoigne assez le zèle et la dévotion des habitants, et parce qu’une bonne partie des habitations est éloignée d’une, et quelquefois de deux lieues ; le Maître de la Case vient ordinairement à la première Messe, avec les principaux Domestiques, et retourne promptement, la Messe étant achevée, pour donner moyen à la Maîtresse de venir à la grande Messe, avec le reste de la famille ; ou bien ils se divisent selon les besoins du ménage, en sorte que tout le monde vient à la Messe. Mais parce qu’ilse rencontre des habitations si éloignées des Eglises, qu’il faut faire quelquefois trois ou quatre lieues par mer avec danger de se noyer, pour venir à la Messe : ceux-ci n’y vont pas régulièrement toutes les Fêtes et Dimanches, et ce serait trop exiger d’eux, que de les y vouloir contraindre, bien qu’il y en ait toujours quelques-uns de la Case qui n’y manquent point"
1670 : Le conflit entre le gouverneur De Téméricourt et le sieur de Surmond a nécessité l’intervention des Carmes, le gouverneur écrit : " Depuis le temps le Sr Surmond sestant repenty de son procédé a emploié le R.P. Ferdinand Carme pour me dispozer a oublier le passé. J’ay condescendu volontiers aux prières du dit Père par la cognoissance que jay en ce que l’Isle perdroit cet habitant, qui est capable de travailler utilement à son augmentation "...
1671 : Le village Caraïbes, appelés " bons hostes " figurent sur la carte commandée par De Téméricourt, avec apparemment 7 carbets vers l’Anse du Coq, appelée alors Anse du Diable. Si nous ne sommes plus en guerre avec eux, ils continuent de subir notre " choc microbien " avec une épidémie de " verette " ou " petite vérole ", c’est-à-dire la variole qui a été ramenée aux Amériques par les Espagnols, les Croisés l’ayant eu mêmes ramenée du Moyen-Orient… Le R.P. Carme Ferdinand écrit : " les Sauvages ont estez grandement affligez a la Dominique ou tous les jeunnes sont presque morts et beaucoup des vieux ". A Marie Galante, il sera obligé d’isoler une famille de Caraïbes : " Il n y a eu que moy a les gouverner pandant leur maladie dans un bois ou je les avois fait retirer de peur qu’ils n’eussent communiqué leur mal a nos negres et aux Francois de nostre caze, Dieu nous en a encore preservé jusque a presant " Les Carmes sont maintenant 3, le supérieur Ferdinand de Saint Claude est remplacé par le R.P. Léonard de St Jean Baptiste, mais sa hiérarchie se pose déjà des questions : " Je crains bien que le R Pere Leonard ne soutienne pas a Marie-Galande la bonne opinion que le pere Ferdinant y a laissé de vostre ordre, je n’ay pas l’honneur de le cognoistre particulierement, ce que je vous en puics dire est qu’il s’en fault beaucoup qu’il n’ait l’approbation generalle ny celle des honnestes gens "…
Nouvel " Estat et invantaire des habitations et autres choses que nous avons dans cette Isle de Mariegalande ", remarquablement complet :
La grande habitation du couvent, au quartier de la Savane, dispose de " 305 pieds de large sur 1.000 de long ", dont la "moitié d'habituée (défrichée) et plantée en canne a sucre et maignoc ". Elle possède une "sucrerie et purgerie toutte ensemble faite de massonnerie de 52 pieds de long sur 20 pieds de large couverte d'essentes" , elle dispose d’un moulin à sucre (à chevaux) avec "charpente couverte en partie d'essentes" . Les "Ustencilles de la dite sucrerie" sont : " 4 chaudières à sucre montée, 2 canots de bois l'un pour servir de refredissoir, l'autre de bassin", " 6 cuiller a sucre tant bonnes que mauvaises" et 10 écumoires ; Sa vinaigrerie dispose d’une chaudière à eau de vie avec un chapiteau et sa couleuvre (serpentin) et de 3 canots. Ces équipements se sont modernisés et sont du type " brésilien ".
Cette huile sur toile de Frans Post d'une habitation sucrerie au Brésil, vers 1660, permet d'imaginer peut-être celle des Carmes, mis à part le moulin ici à eau et non à bêtes...
Suit la liste des animaux, avec un beau cheptel : - 10 chevaux et cavalles (juments) dont 7 "tirant au moulin" pour le sucre. - 21 boeufs, taureaux, vaches et génisses dont 6 "tirant au cabrouet", qui devait servir à se déplacer vers le bourg ou l’embarcadère pour transporter les boucauts de sucre, probablement aussi au transport des cannes vers le moulin. - 15 moutons et brebis - 10 cabrittes (chèvres) - 2 cochons et 2 coches (truies)
Viennent ensuite les " Naigres de la dite Habitation" : 33 esclaves pour cette habitation, 11 hommes dont 7 avec leur femme et 5 couples avec 1 à 3 jeunes enfants, au total 15 enfants. Parmi les hommes, 2 esclaves "à talent" : Nicolas qui est "machoquet" ou taillandier, sorte de serrurier chargé de l’entretien des machettes, houes, haches et pioches et Jouan qui est sucrier et occupe de ce fait avec sa femme Lucresse une position importante. Parmi les enfants, 6 ont entre 8 et 12 ans et sont chargés de petits travaux sous la surveillance d’une matrone.
La 2ème " Habitation où est basti le Couvent ": NB : selon le R.P. Barbotin, elle aurait été implantée sur le site de la future habitation Maréchal, actuellement distillerie Poisson ?
Attention, le Sud est à l'Est, le fort correspond à Grand Bourg...
" La dite habitation doit etre d'environ 400 pieds en carré, qui est presque toute habituée et plantées en cannes a sucre, patates et cotonniers, le reste en savanne" "Les bastiments qui sont sur la dite habitation : - un pavillon d'environ 20 pieds en carré à 2 étages le tout en charpente, dont le 1er étage fait une halle ou réfectoire, avec une depente ou magazin, au 2ème étage 3 chambres pour les religieux avec une belle galerie et au 3ème galetas (grenier). Au dessus du dit pavillon, il ya un petit dome où il y a une cloche. - une cuisine de massonerie avec un petit magazin au bout - une caze de 30 pieds de long palissadez de planches couverte d'essentes, qui sert au chirurgien, avec un magazin au bout - deux autres cazes qui servent pour loger les françois serviteurs et ouvriers - une forge de maréchal (ferrant) de charpente palissadée de planches et à moitié couverte d'essentes - une petite chapelle de 16 pieds en carré de charpente couverte d'essentes " Nos Carmes ont encore des projets d'agrandissement : "Desseins des bastiments commandés : - une cisterne auprès du pavillon - une autre cisterne auprès de la sucrerie - un puy dans la savanne de la sucrerie - une vinaigrerie (distillerie) de 24 pieds de long au dessous de la sucrerie où sont les pierres d'attente que doit faire le nommé Jacques Louis, tailleur de pierre...payé d'avance" " Ustancilles de la cuisine : - une cramaillère - 4 chaudières (casseroles) de fer de différente grandeur - 3 chaudières de cuivre - 1 poille à frire - 1 poillon à queu - 1 poille à faire la farine de maignoc - 1 cuiller à pot de cuivre - 2 friquets (écumoire) de cuivre - 1 broche et 2 landiers (chenets porte-broche) de fer - 1 gril - 1 mortier de fonte avec son pillon" " Ustancilles d'esteim : - 8 plats de differante grandeur - 1 plat bassin à potage - 13 assiettes dont 6 d'esteim fin - 1 escuelle, 1 pot et 1 rape à muscade" " Vessailles de feuillance : - 2 plats et 13 assiettes telles quelles - 1 saliere - 1 petite canne à boire - 2 pots à boire - 1 paire d'armoires telle quelle - 1 garde manger " " Ustancilles de la depanse" ? : - 3 caves de 12 grand flacons - 1 autre cave de 14 grand flacons - 7 grandes cannes de terre et 4 pots - 7 jarres de terre dont 2 pleines d'uille d'olif"... " Argenterie de la ditte maison : - 8 cuillers, 8 fourchettes - 1 tase à boire en argent " Pour les accessoires et outils : - " 4 chandeliers de cuivre pour la table et 1 autre chandelier de cuivre a branches - 15 livres de cire tant blanche que en cierges - 3 livres de bougie blanche - 10 livres de chandelle de suif - 12 pots d'uille à bruler - 19 serpes - 12 houes - 1 scie de travers - 6 fusils tant bons que mauvais - 80 livres de gros plombs" " Meubles : - 4 couches montées avec 3 paillasses, 1 matelas de leinne, 2 matelas de bourre - 4 tables de différente grandeur - 2 cheze à dos (chaises à dossier), 2 chezes à bras (fauteuils), 8 escabeaux (tabourets) - 1 grand coffre de ? - 1 bahu couvert de cuir de moyenne grandeur - 1 petite cassette d'acaiou - 1 hamac qui sert de couverture de lit - 1 hamac double un peu vieil - 1 hamac double tout neuf - 2 celles de cheval neuves avec leur harnois - 2 autres celles de cheval - 8 grandes pieces de ligne à parer (couture du cuir) - 3 autres pieces a rabanner des lits de coton - 1 cabrouet monté - 1 paire de roues neuve ferrée - 3 paires de roues neuves point ferrée - 2 paires de petites roues de charrette - 4 colliers à cheval - 4 paires de bricolles (attelage de traction pour le moulin) tant bonnes que mauvaises" " Instruments de la forge : - 1 souflet presque neuf - 1 gros esthau - 1 bigorgne (enclume à 2 pointes) - 1 tasseau - 1 paire de tenailles a vice (petit étau) - 1 clouière a faire des clous de cabrouet - 1 marteau à frapper devant (lourd marteau de forge à long manche) - 4 marteaux a main - 2 marteaux a river - 6 paires de tenailles - 3 rateaux a haller le charbon - 2 picois (poinçon à frapper)" " Invantaire des ustancilles de chirurgie : - 1 seringue - 1 chapelle a distiler les eaux - 3 poilettes - 1 bassin a faire le poil - 1 poillon a queue - 1 pelican (arrache-dent) - 1 bec de corbin (pince courbe) - 1 cautere - 1 mortier de fonte avec son pilon " Linges de table et autre : - 9 vieux linceux (draps de lit) - 5 de toille neufve - 4 fouilles d'oreiller (taies) - 6 nappes finnées - 2 douzainnes de serviettes finnes - 2 autres douzainnes de serviettes tant bonnes que mauvaises - 4 nappes" " Les Ornements de la petite Chapelle : - 1 Croix de cuivre - 1 Bénitier de cuivre - 1 nappe d'Autel - 1 devant d'Autel - 4 chasubles - 4 voiles - 1 bourse, 1 corporal, 1 pale et 1 purificatoire (linges d'autel) - 2 aubes - 1 calice d'esteim - 1 soleil de cuivre avec une custode (boîte où on enferme l'ostie) aussi de cuivre - 2 ... pour mettre le vin et l'eau - 1 piece d'ettoffe d'environ 4 aulnes (1 aulne = 4 pieds) pour faire un devant d'Autel - 1 piece de guippure (dentelle) pour garnir de devant d'Autel" "Inventaire des livres de cette Maison" : nos Carmes possédent 49 livres, en plus des 2 bibles en latin et de 37 livres religieux, ils ont un petit dictionaire françois, 1 dictionaire caraibe (nécessairement du R.P. Breton, édité 6 ans avant), une histoire de France en 3 tomes, un guide des pêcheurs et un livre sur Ambroise Paré, père de la chirurgie...
Depuis leurs débuts il y a 11 ans, nos Carmes se sont grandement développé et vivent dans un certain confort pour l'époque...
1672 : Nos Carmes fournissent le 25 mai le bilan financier entre les "debtes", 51.003, et les credits 58.442
De plus, ils possédent 2 habitations voisines qui ne sont pas exploitées par eux, mais louées par contrat devant notaire : - l’une affermée à Pierre Ribel comprenant un moulin à sucre, 3 chaudières à sucre, 1 chaudière à eau de vie, fournie avec 10 nègres, 4 boeufs, 2 chevaux et 2 cavalles, louée pour 18.000 livres de sucre par an - l’autre fournie à René Vavon, ancien domestique "fidelle et fiable" avec "6 nègres travaillants et 2 petits", " a condition que le dit Vavon relivera le tiers du provenu de la ditte habitation"
Le R.P. Raphael de Saint Agnès, vicaire provincial des Isles de l'Amérique, contrôle les comptes lors de sa visite à Marie galande le 22 juin : 25 habitants ont des dettes vis-à-vis des Carmes, dont le sieur Dauville " qui doit rendre une chaudière à eau de vie ou bien la payer en sucre 400 " Les Carmes de leur côté doivent de l’argent à 12 habitants, dont au major La Garanne, au capitaine La Motte et au sieur Ricord " 200 livres sur quoi il faut rabattre 70 pour un cent de clous et une paire de souliers " " Martin Plaux commandeur de notre maison a reçu sur ses gages la quantité de 727 livres de sucre. Son année a commencé du premier jour de décembre 1670 dont il doit gagner 2 000 de sucre et un habit et deux paires de souliers et il a reçu l’habit et les deux paires de souliers " " Pour le regard de l’habitation de l’Acajou affermée au sieur Pierre Ribel dont l’année est échue au mois de mars passé, je confesse avoir reçu sur la dite année passée la quantité de 8 160 livres de sucre dont j’ai donné acquit au dit Ribel, d’où il appert qu’il reste à payer pour la dite année passée la quantité de 9 840 livres de sucre " " Pour le regard de la petite habitation qui nous a été donnée par Monsieur de Surmont dont je lui ai donné une idamnité nous étant obligés de le décharger envers ceux de qui il l’a achetée de la quantité de 6 500 livres de sucre, dont nous sommes obligés de donner au dit vendeur du sucre pour payer un nègre quand il en viendra et le restant huit mois après comme il est porté dans le contrat et il faut retirer l’idamnité du dit Sr de Surmont à la fin du dit paiement " " L’église nous doit encore un grand missel 500 plus un missel et deux rituels 500"…
Le R.P. Carme Léonard de Saint Jean-Baptiste conclut dans un rapport que sur le plan financier les habitations sucreries pouvaient rapporter à l’ordre au moins 6000 livres de sucre, autrement dit beaucoup plus de profit que ce qu’elles faisaient alors. Pour justifier son propos, il souligne que les colons n’ayant pas plus de bien que le Carmel " vivent fort aysémant eux, leurs fames, leurs enfants, et leurs valets, les tenant habilles ; et foncent aux depances que font leurs fils, dans les meilleures villes de France, ou il les envoye bien souvant, pour estre instruicts. Leurs fames, leurs filles et eux estant pour la plus part du tamps en veste de soye et de fin lin ; encore espargnent-ils par la suitte d'années, de quoy les marier, selon la calité qu'ils tiennent, non obstant plusieurs autres depances qu'ils sont obligés de fere très souvant et que la bien seance nous interdiroit, quand mesme nous aurions la volonté de les fere. Cecy est si clair, qu'il n'y a personne quy ait faict voyage en ces cartiers, qui le puisse ygnorer "… Le R.P. Carme, ayant conscience que de tels propos pouvaient le faire passer pour quelqu’un d'intéressé et allant de surcroît à l’encontre de son voeu de pauvreté, rajoute : " Je n'antans pas par ce que j'ay dit que le religieux qui auroit cette commission agist comme fermier ou locataire, en sorte qu'après avoir fourni les sommes que je marque, il eust droit de jouyr ou de s'aproprier (Dieu m’en garde). Je scay trop bien à quoy nous obligent nos voeux et l'observance de nostre resforme mais je parle comme un prieur dans nostre province qui auroit soubs soy six religieux, et sept cent excuz de revenu et qui par la bonne oeconomie, le zelle et diligence de ces religieux, il en espargnoit par an sept, ou huict, ou neuf cent "…
1673 : Les Carmes des Antilles sont en difficulté numérique et financière, le père supérieur des Carmes de Touraine, Marc de la Nativité de la Vierge, écrit au responsable de la Propaganda fidei à Rome, afin qu’il " daigne demander des lettres à la Sainte Congrégation de la Propagande de la foi pour les religieux de la province de Touraine dans l’isle de Marie-Galante en Amérique méridionale et aux îles adjacentes et aussi en terre barbare du continent ". Sa lettre restera sans réponse…
A l'occasion du mariage de la fille de Robin Ruaux, commandeur de l'habitation des Carmes, avec Charles Vallois, économe de la Maison du Marquis de Téméricourt, le R.P. Léonard doit certifier les notaires : " Nous, Léonard, Religieux Carme de la province de Touraine, supérieur du couvent du même ordre & pasteur de l’église de Marie Galante en l’Amérique, certifions & attestons les sieurs Frambourg et Gouverne être vraiment notaires jurés et d’autant qu’il n’y en a eu point davantage en toute cette dite île, déclarons que pleine et entière foi doit être donnée à toute la teneur de leurs actes et rapports ci-dessus mentionnés de la vérité desquels nous avons bonne connaissance. En foi de quoi nous avons signé ces présentes en la dite île Marie-Galante dans notre couvent y situé, le huitième jour de novembre "
1676 : Le R.P. Carme Léonard entre en conflit avec le gouverneur. On en arrive à l’excommunication et le Père refuse de célébrer aucun office où se présenterait M. de Téméricourt. Le peuple se rassemble dans une chambre du couvent, car il n’y a pas d’autre église...
Le dernier jour de mai, attaque des Hollandais commandés par Jacob Binckes avec 10 navires et 1.350 hommes, utilisant le prétexte de la Guerre de Hollande. Selon le témoignage ultérieur du gouverneur De Téméricourt, absent lors de l’attaque : les Hollandois ont enlevé " presque tous les esclaves, grand nombre de bestiaux, les chaudieres à sucre, serrures de moulin, ustancilles, meubles, hardes et linge ; en sorte qu'il ne se voit resté auxdits religieux en jcelle, nonplus qu'ausdits habitants que les terres seules et hors d'estat de sauver les cannes a sucre et vivres qui estoient dessus "
1680 : A Marie-galante, 4 ans après l’attaque des hollandais et le pillage de l’île, la situation est loin d’être revenue à la normale : manquent toujours les chaudières et le matériel des sucreries, ainsi que la main d’œuvre, la quasi-totalité des esclaves avait été emportés par les attaquants. Aucune sucrerie n’a pu donc redémarrer… Les Carmes sont en difficulté, pour relancer leur activité sucrière, ils sont obligés de vendre une partie de leurs terres au sieur Charpin pour 4.000 livres tournois.
1681 : A Marie-Galante, une seule sucrerie en activité : celle des Pères Carmes avec 17 esclaves, presque 2 fois moins qu’avant la guerre… Avec le retour de la paix, les colons reviennent et reconstruisent quelques sucreries.
1683 : Une Ordonnance du Roy du 30 septembre demande au gouverneur général de Blénac et à l'intendant général Bégon de délimiter chacune des cures des Isles, de concert avec les religieux qui les desservent, ce qui sera fait l'année suivante.
Le marquis de Seignelay, fils de Colbert et nouveau Secrétaire d’Etat à la Marine écrit au R.P. Provincial Carme de Touraine, responsable des missions aux Antilles : " Mon Reverend Père, Le Roy ayant esté informé qu'il y a trop peu de religieux de vostre ordre aux isles de l'Amérique pour faire les fonctions curialles dans les quartiers qu'ils sont obligéz de desservir : sa Majesté m'a ordonné de vous escrire qu'elle veut que vous disposiez six des religieux pour passer incessamment aux d isles et que vous me fassiez scavoir le nom de ceux que vous aurez destiné pour ce voyage et le temps auquel vous les ferez partir "
Les prévisions de dépenses du Domaine sont faites pour les missionnaires, "le Roy voulant establir dans chacune des Isles Francoises de l'Amérique deux Eclesiastiques pour y faire les fonctions curialles, Il conviendra de faire la dépense qui suit, scavoir ... deux prestres a Marie Galande : 24.000 livres de sucre".
1686: Dans un rapport, l'intendant Dumaitz demande des religieux "supplémentaires pour desservir différents quartiers. On aurait besoin de trois églises, la dite île étant partagée en trois quartiers. Dans celui du Fort (Grand Bourg) il y a une église establie, dont le père dessert la dite église et est logé à l’habitation de Pierre Corsaire, le reste est en projet aux Galets et à Vieux Fort"...
Le 13 octobre, le Conseil d’Estat rend l’accord entre les Ordres religieux exécutoire avec la création des 16 premières paroisses de Martinique et Guadeloupe.
1687 : Les Carmes de Touraine envoient un commissaire pour inspecter leurs missions aux Antilles : Antoine de Sainte Anne, secondé par Cyrille de Sainte Marie-Madeleine et Zacharie de Saint Thècle. Ils débarquent à St Christophe et les premiers échanges avec le vicaire général des Iles, Julien de Saint Germain, est conflictuel… Le commissaire nomme comme responsable Boniface de Saint Georges, mais Julien de Saint Germain refuse de partir…
Ils partent ensuite en inspection sur Marie Galante, administrée par les R.P. Carmes Hilaire de la Purification, supérieur, Ambroise de Saint-Léon,Séraphin de Sainte-Marie et Raphaël de Sainte-Agnès. Ils rencontrent le Supérieur Hilaire de la Purification et constatent un détournement des gains du sucre à son profit " en nature et en effets ". De plus le nègre Romain s’est plaint au gouverneur qu’il " faisait du mal à sa fille "… Il décide de le renvoyer en France, mais Hilaire ne le reconnait pas comme son supérieur, n’obéissant qu’au vicaire général Julien, et décide de rester sur place… Il semble qu’il ait aussi contracté une maladie vénérienne…
Ils poursuivent leur inspection aux Saintes, où le père Chrisogon est accusé également de détournement et d'où il disparaitra en mars suivant …
Dans la nouvelle mission de St Domingue, le père Archange de Saint Guillaume est accusé d’ivrognerie, ils demandent son départ, le père Zacharie de Saint Thècle part le remplacer et, une fois sur place, lui permet de rester car aimé de tous les habitants… Le commissaire Antoine de Sainte Anne rentre en France avec un bilan mitigé, mais il avait pu rappeler les exigences des Carmes.
A Marie-Galante, le gouverneur Auger effectue une inspection des églises en décembre : il constate que "Notre Dame de la Conception au bourg de la Basse-Terre" a besoin de 10.000 livres de travaux et que l'église du bourg de la Capesterre demande 20.000 livres de travaux.
1688 : Auger a reçu 20 "religionnaires" (protestants). Les 2 églises ont été réparées. Les Carmes sont 4 en janvier lors de la visite du commissaire Antoine de Sainte Anne.
Le R.P. Carme Antoine de Sainte Anne revient à St Christophe en décembre, non plus comme commissaire, mais comme vicaire général des Isles, en remplacement de Julien de Saint Germain décédé. Il trouve la mission dirigée par Boniface de Saint Georges dans un état épouvantable, avec encore des détournements de biens et des plaintes pour violences : Boniface " maltraitoit extremement les negres, les faisoit chatier cruellement, et pour la moindre faute les outrageoit de paroles accompagnées quelquefois de blaspheme et de ce mot infame de bougre ", il est " cruel pour les negres dont il a fait mutiler grand nombre "... " il est convaicu d’avoir débauché des négresses " Le vicaire le convoque devant les 3 Carmes Cyrille, Martial et Nicolas, refuse de valider ses comptes et demande son renvoi en France. Mais le vicaire général se trouve bientôt accusé par Hilaire et Boniface d’avoir eu des " commerces infâmes " avec des religieuses de Nantes !
1689 : A Marie-Galante, le gouverneur Auger a fait construire 2 batteries et 2 retranchements dans la crainte d’une attaque des Anglais " dans les lieux de l’Isle pour lesquels il y a le plus à craindre "…"Les habitans se sont portés avec beaucoup de zèle à tous les travaux, à l’exception des Pères Carmes qui ayant une habitation considérable ont refusé d’y contribuer, s’excusans sur les privilèges "
Les pères Carmes sont 3 pour le couvent, l’habitation et les 2 églises : les R.P. Raphaël de Sainte-Agnès, Ambroise de Saint-Léon et Séraphin de Sainte-Marie.
Le "Provincial des Carmes reformez de la province de Touraine" demande le remboursement de frais qu'il a engagé depuis 1683 pour les "Isles de St Christophe et de la Guadeloupe"...
1690 : A Marie-Galante, le 9 janvier, 3 vaisseaux Anglais commandés par le Captain Hewetson attaquent l’île : ils repartent le 13, en ayant incendié le bourg, détruit tous les moulins et 12 des 16 sucreries. Le 8 mai, le R.P. Antoine de Sainte Anne,vicaire provincial des Carmes missionnaires de l'Amérique. écrit au ministre Seignelay : " Monseigneur, Apres avoir eté une fois entierement ruinés par les Hollandois dans l’isle de Mariegalande, nous avons creu (touts les autres religieuxs refusant d’y assister les peuples) que la gloire de Dieu, et les services que nous devons icy aux fidels suiets de sa maiesté ne nous permettoient pas de les abandonner sans prestres; ce qui nous avoit obligé d’epuiser les autres maisons de notre mission pour en retablir une dans cette isle abandonnée, mais y aiant eté une seconde fois pillés, bruslés et entierement ruinés, nous vous supplions, Monseigneur, de vous servir de votre charité pour donner quelque secours a trois pauvres religieuxs Carmes, qui malgré toutte la misère, qui est la triste suite du pillage d’un ennemi, n’ont point abandonné ces habitants desolés, a quoy ils auroient eté contraints si nous ne nous etions pas depouillés a la Guadeloupe, tant pour contribuer a les revêtir, nourrir, que pour faire des miserables baraques pour les loger attendant que votre altesse leur fasse quelque gratification ce que nous luy demandons par charité, et ce qui nous obligera a redoubler nos prieres pour la conservation et la prosperité de votre altesse, que nous continuons touts les jours, et moy en particulier qui suis avec un profond respect "…
1691 : Après la deuxième attaque Anglaise du 23 mars, les 2 Pères Carmes sont cette fois "déportés" en Martinique avec les survivants sur le brigantin de M. Roussel...
1694 : En Martinique, le Père Jean-Baptiste Labat arrive comme missionnaire dominicain dans la paroisse de Macouba. Les Dominicains sont les religieux les mieux représentés en Martinique, avec 12 religieux et 7 paroisses.
1695 : Les Carmes ne sont pas encore revenus. Selon la correspondance de l'intendant général Dumaitz du 11 mars : "Le V. Biesse, prestre seculier et estably sur une habitation a la Grandeterre...je luy ai propose de passer a Mariegalande, il s'y rendit avec beaucoup de soubmission, ou il a fait les fonctions curiales jusques a l'arrivée des Carmes auxquels le service de cette isle est tombé en partage"...
1698 : Devant la menace d'une nouvelle attaque, le gouverneur Auger est chargé de proposer à nouveau l’évacuation de Marie-Galante : il redoute que l’île devienne alors un repaire de corsaires, il préférerait qu’on la repeuple avec des engagés.
Les pères Carmes sont de retour à 3, les R.P. Lucien de Saint-Louis, Spiridion et Bernardin.
1703 : Premier acte enregistré sur l’île parvenu jusqu’à nous : le baptème de Pierre Legal, fils de Pierre Legal et Françoise Duverger, administré par le Frère Carme Estienne de Saint Quentin à Capesterre le 26 août…
1706 : A Marie-Galande, les Anglais viennent d’être chassés par Cloche de la Malmaison, qui constate que l’île, sans défense, est restée sans gouvernement, ni juge pendant la guerre, mais qu’une majorité d’habitants sont restés malgré tout : " Il y avoit deux paroisses pendant la paix mais depuis la guerre, on n'a pu y envoyer qu'un Carme qui suffit pour toute l'isle" Le 5 décembre, Barthélémy de la Tour Jean est nommé commandant de l’île. Il trouve 2 curés Carmes en place, le Père Estienne de Saint Quentin " très digne relligieu" » et le Père Gabriel " déréglé dans ses fonctions pastorales comme dans ses mœurs " qu’il fait révoquer et renvoyer en France. Le Père Martin qui le remplace restera 18 mois " ne s’occupa qu’à se promener hors de l’isle…plusieurs personnes moururent sans sacremens ". Il périra dans le naufrage d’une barque en allant à la Martinique, après avoir maudit le capitaine…
L'âge d'or des Carmes sucriers se termine...
1709 : Sur le registre de la paroisse de Capesterre de Marie-Galante, tenu maintenant par le frère Carme Martin de Saint Jacques, 12 baptêmes et 3 mariages.
1712 : Protestant "contre les religieux qui négligent l’instruction des nègres", le gouverneur général Phélypeaux, partisan du baptême sans instruction, écrit : " Les jacobins et les capucins sont très relâchés sur le baptême des nègres adultes. Surtout, les capucins les prolongent trop, plutôt par négligence ou faute de faire leur devoir... Ils consomment un ou deux ans avant que de conférer le baptême, disant qu’il faut instruire les nègres"
1713 : A Marie-Galante, le Père Carme Jacques succède au Père Martin, il part au bout de 3 mois sans laisser d’adresse… Un nouveau Carme arrive 4 mois plus tard, le Père Lucien : " il a un penchant extreme à s’enyvrer " : il crée un scandale lors de la Fête de Notre Dame, incapable d’articuler et fracassant l’encensoir sur l’autel…
Le R.P. Carme Damase est envoyé pour le seconder : " il resta fort peu de temps, s’estant embarassé dans deux affaires d’yvrognerie ", il finit par partir sur un bateau pour Monserrat… Le Père Lucien sera retiré de sa cure sur demande du gouverneur, et remplacé par un nouveau Père Carme plus convenable… La mauvaise conduite des Carmes de Marie-Galante vaudra à leur Supérieur Des Billettes un courrier de l’administration Royale…
1716 : Le marquis de Feuquières intervient dans un conflit entre les Carmes et les Capucins sur la nouvelle paroisse de St François à Basse-Terre. Le Supérieur des Carmes est le R.P. Maximain.
1718 :En Guadeloupe, Savinien-Michel de Lagarrigue de Savigny, gouverneur intérimaire, fournit le nouveau recensement le 20 juin. Sur le plan religieux, il recense 15 paroisses pour 14 bourgs, avec 27 religieux dont 4 Carmes.
1719 : Vaultier de Moyencourt, gouverneur de la Guadeloupe, fournit en décembre un " État des biens appartenant aux religieux de la Charité, Jacobins, Jésuites et Carmes"
1721 :Lettres patentes du Roy en forme d'Edit fixant les privilèges et exemptions des ordres religieux établis aux Isles du Vent
1723 :Arrêt du Conseil du Roy portant exemption de capitation de nègres en faveur des religieux installés aux Isles du Vent.
1724 : Mr Lefebure, est missionné pour rendre une copie annuelle sur " la distribution des fonds faits sur l’Estat du Domaine d’Occident pour les appointements des cures " pour l’ensemble des Isles du Vent.
Pour Marie Galande, il prévoit 12.000 livres de sucre pour chacune des 2 cures tenues par les Carmes, la Conception à Basse-Terre (Grand-Bourg) et Ste Anne à la Capesterre : son rapport sera entériné par l’intendant Blondel.
1725 : Le 8 juillet, le sieur Etienne Guérin abjure la religion calviniste devant le R.P. Simon, Carme...
1727 : Le gouverneur général, le marquis de Feuquière, fait le point sur l'île dans une correspondance adressée au Ministre de la Marine, il parle entre autres des Carmes et de l'établissement de la nouvelle paroisse à Vieux Fort de Mariegalante :
Il précise que "l'Eglise, le Presbytaire et d'autres batimens necessaires pour cette cure seront faits aux depens des nouveaux Paroissiens, aussy bien que la fourniture des ornements"... Il demande aussi la pension habituelle de 540 livres par an pour le nouveau Carme.
1728 : Le lieutenant de Roi Robert Philippe de Lonvilliers de Poincy prend l'intérim du gouverneur Pierre Le Bègue. Il demande le poste de gouverneur par son courrier du 4 février, où il fournit le recensement général dans les 3 paroisses. Il se plaint du manque de prêtres Carmes, quasi permanent depuis l’attaque anglaise de 1691 : 1 ou 2 paroisses en sont régulièrement dépourvues, " des habitants et habitantes sont morts sans les sacrements ". Il souhaite qu’un autre ordre, par exemple les Capucins, soit nommé à ces fonctions curiales, créant une émulation et évitant la négligence… Le Carme en place " est un jeune homme de 28 ans, altier, paresseux et méprisant les habitants "... " Il y a environ six mois qu’il détruisit entièrement une sucrerie que son ordre avoit icy, parceque son supérieur ne vouloit pas luy accorder une augmentation de nègres pour la rendre aussi lucrative qu’il la vouloit " : il a ainsi vendu les bestiaux et les nègres en Guadeloupe sans autorisation ni de son supérieur, ni du gouverneur…
Le provincial des Capucins de Rouen, le R.P. Josaphat, se dit prêt à envoyer un missionaire pour créer une nouvelle paroisse à Marie Galande : il n'arriveront pas à venir concurrencer les Carmes...
Le gouverneur général Champigny de Noroy, devant la mauvaise conduite des Jacobins cette fois, décide "...nous ne recevrons dans les Isles du Vent aucuns Religieux Jacobins qu'ils ne soient porteurs de Certificats de leurs Provinciaux de leur bonne vie, moeurs et capacité et nous renverrons en France ceux qui n'en seront pas munis."
1729 : Un "Estat de la distribution" des "Charges Payables par le fermier du Domaine d'Occident est fourni concernant les fonctions curiales des Isles du Vent :
Pour Marie Galande, on retouve les 3 paroisses desservies par les Carmes : La Conception à la Basse-Terre (futur Grand-Bourg), Ste Anne de la Cabesterre, enfin Vieux Fort et Anse du Vent qui vient d'être pourvue d'un prêtre. Les habitants se plaignent du Père Valérien, qui occupe cette cure de Vieux-Fort, il sera remplacé sur ordre du gouverneur par intérim par le Père André. Un nouveau curé est envoyé par les Carmes, avec rapidement de nouvelles plaintes...
lzPar contre à La Conception, le Père Téléphore est très apprécié.
1733 : Le "Bordereau des recettes et dépenses concernant l'estat des charges du Domaine d'Occident aux isles françoises du Vent de l'Amérique pour l'année 1733 suivant le compte arresté par M. d'Orgeville, intendant" nous donne "la subsistance des cures aux Isles du Vent ":
A Marie Galande, le Père Carme Godefroy est renvoyé en France par son supérieur et n’est pas remplacé dans sa paroisse par "manque de missionnaires",il partageait son "yvrognerie" avec le lieutenant La Chaussée et le chevalier Du Boetier qui seront expulsés par le gouverneur....
1734 : Le gouverneur Robert Philippe Lonvilliers de Poincy écrit à l’intendant d’Orgeville et lui signale en autre qu’il a renvoyé le père Carme Rodolphe pour " yvrognerie et insultes ", et l’a fait remplacer par le père Yves…
1737 : La cure de Vieux Fort est à nouveau vacante, faute de missionnaire Carme, malgré les relances du gouverneur général :
Dans le "Mémoire du Roy pour servir d’instruction au Sieur De Lacroix, intendant des Isles du Vent" sont détaillés les ordres religieux responsables des paroisses : "Les Carmes n'en ont que peu, et ne sont établis qu'à la Guadeloupe et à Marie Galande"
1741 : Le supérieur des Carmes pour les Isles du Vent, Henry de Saint Sauveur, fournit à l’Intendant général l’état de ses missions, avec 7 paroisses, 3 en Guadeloupe, 1 aux Saintes et 3 à Marie-Galante.
Pour Marie-Galante, le Carme chargé de la paroisse de la Conception du quartier de la Basseterre (futur Grand-Bourg) a un revenu de 540 livres du Domaine et environ 300 livres de frais pour la messe, la maison conventuelle, sa subsistance, 3 esclaves et 1 cheval. Celui de Ste Anne de la Capesterre reçoit aussi 540 livres du domaine, mais avec 600 livres de frais. Enfin celui de St Joseph à Vieux-Fort toujours 540 livres et 200 de frais. Le supérieur se plaint que les terres concédées par l’ancien gouverneur De Boisseret " nous étois plus dommageable qu’avantageuses. D’ailleurs nous n’avons pas le moyen d’y mettre des nègres pour les faire valoir. En temps de guerre, l’ennemy a enlevé deux fois ceux qui y estoient "
1742 : A l’Eglise de la Conception de Grand Bourg, moins de 3 pages et 10 actes pour le curé de la paroisse, le R.P. Carme Télésphore. L’île vit au ralenti… A Vieux Fort, Jean Sarragot et sa femme Elisabeth Moore font baptiser leur fils Jean Baptiste par le R.P. Carme Stanislas de Coetdihuel. 15 actes cette année pour le curé de Vieux Fort. Par contre, 37 actes pour le curé de Capesterre, le R.P. Carme Cyrille, dont le baptème d’Alexis, 6 mois, caraïbe : le parrain est le sieur Lebrun Cognet, la marraine Françoise Fontaine. Capesterre semble avoir été un peu préservée par le cyclone de 1738, son économie est moins dépendante du sucre…
1743 : Déclaration du Roy "portant que les ordres religieux ou communauté établis dans les colonies françaises ne pourront acquérir aucune terre ou maison, ni former aucun établissement sans la permission du Roy, sous peine de confiscation et de réunion au Domaine"
Le Gouverneur Général des Isles du Vent, Jacques Bochart seigneur de Champigny et l'Intendant général César Marie de La Croix ont demandé en août 1741 un "Estat des revenus des différents ordres missionnaires". Il est fourni pour les Carmes en février 1743 par le R.P. Henry de St Sauveur, supérieur de la Mission :
On voit que les Carmes possédent 2 habitations à la Guadeloupe qui leurs rapportent peu "depuis quelles années que cet isle a été affligée d'ouragan"... "Ils ont une autre habitation à Marie Galande qu'ils ont laissé en friche depuis que les Anglois ont pillé et enlevé ce qui était dessus lors de la dernière guerre" " Les pensions qu'ils recoivent du Roy montent à 3.645 livres"..."Ils n'entrent dans aucun détail de leurs dépenses, ils disent seulement qu'elles excédent leur recette de plus de moitié". " Ils ne desservent en tout que 3 cures a la Guadeloupe, 3 a Marie Galande et une aux Saintes"
1753 : Le nouveau gouveneur général Maximin de Bompar et l'intendant général Charles Marin Hurson prennent une ordonnance pour fixer le nouveau tarif des droits curiaux dans les Isles du Vent, qui semblaient inadaptés et variables :
On voit que les baptêmes, mariages, sacrements et levée de corps sont gratuits pour les pauvres, tout le reste est payant...
Le Supérieur des Jésuites écrit " au sujet d’une Confrérie de Negres qu’on vouloit établir à la Guadeloupe…qu’un pareil établissement étoit tout à fait contraire aux intentions de sa Majesté et qu’ils eussent grand soin de défendre aux Missionnaires, qui étoient sous leur conduite, de faire aucune assemblée d’esclaves, sous quelques prétextes que ce pût être, et leur en avoir fait sentir les funestes inconvénients, qui pourroient en résulter "
1761 : Un Mémoire précise l'obligation pour les préfets apostoliques d'enregistrer leur nomination "aux Greffes des Conseils Supérieurs des Colonies"
A Marie Galante, le R.P. Eugène de Saint Joseph arrive comme curé Carme de Capesterre, ce créole de la Martinique, pour l’état civil Noël Joseph Martineau, est le frère ainé du futur notaire marie-galantais Louis Joseph Martineau, alors encore greffier au tribunal.
1763 : En mai, le gouverneur Joubert fait faire l’inventaire des biens des 3 paroisses administées par les Carmes : à Grand-Bourg, le curé est le Père Léandre Cabarel, à Capesterre, le curé est le Père Eugène Martineau, à Vieux-Fort, le curé est le Père Jacques Henriot.
Le 25 décembre, les vices-préfets apostoliques des 3 Ordres présents à la Guadeloupe (Dominicains, Capucins et Carmes) écrivent au gouverneur et à l’intendant " de tenir la main à l’exécution des ordonnances qui engagent les maîtres à nourrir leurs esclaves "
1764 : Ordonnance du marquis de Peynier, intendant de la Guadeloupe, concernant l'obligation, pour les curés de l'île, de tenir les registres des baptêmes, mariages et sépultures.
1767 :Les Carmes échangent de leur habitation, appelée Bellevue, située à Marie-Galante, avec celle dite du Dos-d’Ane (futur Gourbeyre), appartenant à Beausoleil de Vermont, située en Guadeloupe.
La Compagnie de Jésus, après des années de conflit avec la couronne, est bannie du Royaume de France en mai et les biens des Jésuites confisqués.
1773 : Edit de Louis XV en mars qui ordonne que les paroisses des îles seront à l'avenir desservies par des prêtres séculiers portant le nom de missionnaires, sous l'autorité de 2 vicaires apostoliques, l'un en Martinique, l'autre à St Domingue : l'Edit décharge les Ordres religieux de la desserte des paroisses et leur ordonne de se retirer dans les maisons de leur ordre qui leur seront indiquées par leur Supérieurs. Le pouvoir royal décide d’envoyer des prêtres séculiers choisis par leurs évêques et approuvés par le duc de Choiseul.
1774 : L'Edit de mars 1773 a déclenché des constestations multiples qui vont aboutir à son annulation en septembre 1774, car selon un Mémoire : "les Religieux ont enlevé à la culture des terres... plusieurs de ces missionnaires sont revenus en France, quelques uns sont passés dans les Isles Anglaises et leurs paroisses sont sans pasteur"...
1775 : Le R.P. Lambert Girardin, Provincial des Carmes de Touraine, écrit le 20 janvier au ministre De Sartine pour obtenir le passage en Guadeloupe du R.P. Vincent Pocard en remplacement du R.P. Richard, gravement malade. Il demande une place sur le frégate La Pourvoyeuse. Le ministre lui répond le 31 janvier que la frégate a déja "mis à la voile et qu'il faut chercher une autre"...
Une liste des cures est établi pour les missions de la Martinique, de la Guadeloupe et dépendances ainsi que pour St Domingue.
Pour Marie Galante, on retouve seulement des Carmes : le Père Cahurel à Grand Bourg, le Père Martineau à La Capesterre et le Père Fraval au Vieux Fort.
La carte anglaise de Jefferys localise parfaitement l'Eglise de la Basse-Terre, futur Grand Bourg ainsi que la chapelle et l'habitation sucrière des Carmes.
1776 : Le comte d'Arbaud, dés son arrivée comme gouverneur de la Guadeloupe, supprime les pensions des curés Carmes et Dominicains.
1777 : Le gouverneur de la Guadeloupe, le marquis de Bouillé écrit : "La haute police de la religion est entre les mains des administrateurs. Dans les colonies, il n’y a point d’évêque. Des préfets apostoliques qui sont à la tête des différentes missions composées de religieux de différents ordres desservent les paroisses ; ils prennent leurs pouvoirs du pape, et sont pour la discipline, aux ordres des administrateurs qui réunissent les pouvoirs temporels des évêques, et dont le tribunal remplace celui de l’officialité en France et dans les autres États catholiques de l’Europe ; les curés sont amovibles et peuvent être déplacés, soit par les administrateurs, soit par leurs supérieurs ecclésiastiques"
Les Pères Capucins des Isles du Vent ont obtenu fin 1776 un Bref Papal de Benoit XIV les autorisant à "conférer le sacrement de confirmation". En décembre, le Préfet Apostolique des Carmes et le Vice Préfet de la Mission des Carmes demandent "les mêmes pouvoirs"...
1779 : Arrivée du père Carme Pierre Joseph Toulmé comme curé de Vieux Fort et du père Carme Eugène comme curé de Capesterre.
1781 : Louis XVI prend une ordonnance qui confie aux gouverneurs et intendants la police du culte et le contrôle des préfets apostoliques...
1783 :Stephano Borgia, secrétaire de la Propagande de la Foi à Rome, transmet au père Stanislas Travers sa nomination en tant que préfet apostolique de la mission de la Guadeloupe et dépendances, signée du Cardinal Antonellus. Le R.P. Travers demande son enregistrement pour pouvoir nommer un vice-préfet.
1784 : Le curé Carme Vianney est aussi aumônier de l’Hôpital Militaire : il atteste le 10 février que le canonnier Pierre Neidit est mort muni des sacrements et qu’il a été enterré au cimetière de l’Hôpital.
1785 : Le Père Carme Toulmé quitte la cure de Vieux Fort pour celle de Grand Bourg
1789 : L'Assemblée Nationale décrète le 2 novembre que "tous les biens des écclésiastiques qui sont mis à la disposition de la Nation"
1790 : Le décret du 16 février interdit les voeux monastiques et supprime les Ordres religieux, dont les Carmes qui vont devoir disparaitre pendant près de 15 ans...
1791 : La Loi du 22 juillet garantit le "libre exercice de tous les cultes"
1792 : Le Père Carme Toulmé se réfugie en Dominique devant l’imminence des troubles révolutionnaires…
1793 : Le 25 juin, le père Toulmé, de retour dans l’île, se marie avec Marianne Victoire Balois, mineure autorisée par sa mère tutrice, qu'il va mettre enceinte chaque année... Cela ne l’empêchera pas de continuer son activité de curé pendant 1 an, il sera ensuite "garde magasin de la République", puis instituteur et finira " propriétaire bourgeois "...
Le 23 novembre, la Convention promulgue le décret de Fermeture des églises et le 24 la suppression du calendrier grégorien... Dans beaucoup de régions, les troupes révolutionnaires vont piller les églises et fondre les cloches pour en faire des canons...
1794 : Robespierre introduit le Culte de l’Être Suprême par décret du 7 mai, ce culte disparaitra avec lui...
1795 : La réouverture des Églises démarre à partir de mai...
1796 : En Guadeloupe, lors de la mise en place d’une imposition spéciale, les esclaves des ateliers religieux sont recensés : les Frères de la Charité ont 215 nègres, les Carmes 157 et les Jésuites 139…
1797 : Le 19 mars, devant notaire, le Père Carme Claude Florent Bouchard de la Potherie prend la succession de l’Abbé de Montecote, décédé, à la paroisse Saint Joseph du Vieux Fort. Il a été nommé par le R.P. Rimi le Roi, supérieur des Carmes et vice-préfet apostolique pour les Isles du Vent.
1802 : Le 2 décembre, suite au Concordat passé en 1801 avec le pape Pie VII, le Premier consul prend un arrêté qui réorganise les églises dans les colonies : " Art. 3. A l'avenir, les préfets apostoliques seront nommés par le Premier Consul ; ils recevront du Pape leur mission épiscopale, et de l'archevêque de Paris leur mission ordinaire ; ils pourront être révoqués à volonté par le Premier Consul ; ils ne seront aptes à exercer leurs fonctions qu'après avoir rempli les conditions portées dans l'article précédent. Les préfets apostoliques seront mis en possession par l'ecclésiastique que l'archevêque de Paris désignera. Art. 4. Les curés en exercice seront pareillement confirmés, en prêtant par eux, entre les mains du préfet colonial ou tel fonctionnaire que le préfet colonial désignera, le serment prescrit par l'article 2. Art. 6. Les préfets apostoliques ne pourront publier, ni autrement mettre à exécution, aucun bref, bulle, rescrit, mandat, et autres actes émanés du Pape ou d'un supérieur ecclésiastique étranger, sans l'autorisation formelle du Capitaine-général. Art. 7. Les prêtres qui desservent actuellement, ne pourront être assistés ou remplacés que par des ecclésiastiques agréés par le Gouvernement et munis de lettres démissoriales de l'archevêque de Paris. Art. 8. Les propriétés appartenant aux missions continueront à être administrées comme par le passé et leurs revenus seront employés aux traitements des ministres du culte sans distinction : la quotité en sera fixée par le Capitaine-général."
Par la suite, les Carmes, seule congrégation religieuse présente depuis 1660, ne feront plus jamais parler d’eux à Marie-Galante, ils sont remplacés par un clergé séculier…
1804 : Le 25 mars, 4 Germinal an XII, " le citoyen Jean Louis Denis Maignial, digne prêtre du diocèse de Montpellier " prend possession devant notaire de la cure de l’église paroissiale de Grand-Bourg, qui lui a été accordée par le préfet apostolique François Auguste Trepsac.
1825 : L'église de Grand-Bourg a été détruite par le cyclone du 26 juillet. Les habitants des 4 communes alors existantes (Grand-Bourg, Grand-Bourg Campagne, Capesterre et Vieux-Fort-Saint-Louis) entreprendront de la rebâtir à frais communs.
Le gouverneur Jacob écrit : " Les 3 paroisses de Marie-Galante étaient autrefois desservies par les Carmes ; 1 seul curé les administre aujourd’hui "...